je veux du soleil, je veux du soleil dans mon petit déj'!

Le soleil se levait. Les premiers rayons pénétrèrent doucement la chambre. Derrière les voiles semi-transparents rouge sang ornés de broderies mordorées s'esquissait la silhouette de la jeune femme. Au loin, les premiers chants religieux s'élevaient, les lourdes cloches de cuivres et de bronze retentissaient. Magnolia, assise négligemment au milieu de ses coussins, ses draps de soie entremêlés, restait immobile. D'un regard absent, elle observait la progression des rayons du soleil dans ses appartements. Sur la console, de l'encens brûlait lentement, relâchant des volutes de fumée. Les suivantes avaient déjà préparé ses affaires pour la journée. Elles s'étaient éclipsée avant que Magnolia ne se réveille complètement.

L'esprit encore embrumé par le sommeil, la jeune femme s'étira tout en bâillant. Rares étaient ceux qui l'avaient dans une telle situation : ses cheveux noirs emmêlés, le regard dans le vague, sa légère robe de soie décentrée... Le réveil avait toujours été difficile pour la jeune femme. Et tout le monde le savait. De nombreux domestiques avaient souffert de sa mauvaise humeur au réveil. La punition pouvait aller d'une simple remontrance à la séance de torture. Tout dépendait de son humeur. Craignant l'ire de leur Dame, l'ensemble de la maison avait appris à ne pas la déranger avant qu'elle ne sorte d'elle-même de son lit.

Peu à peu, son regard devenait de plus en plus vif. Elle venait de se souvenir. Aria, sa chère petite Aria, aurait dû rentrer de sa mission durant la nuit. Ce n'était pas une mission très compliquée, pas pour elle. Juste fouiner de-ci de-là. Prendre la température. Aller se promener un peu partout. Récolter des informations. Tous types d'informations. Magnolia voulait savoir ce qu'il se passait dans l'ensemble de la société. Elle voulait découvrir toutes les intrigues qui étaient élaborées à l'abri des regards indiscrets. C'était important de savoir. Cela lui permettrait de savoir où se trouvaient les intérêts cachés des unes et des autres, mais aussi de savoir sur qui elle pourrait faire pression, qui elle pourrait acheter et qui elle allait avoir besoin de manipuler.

Du coin de l'œil, elle vit les lourdes portes d'ébène s'entrouvrir. Une ombre restait dans l'entre-bâillement, attendant l'invitation de la maitresse des lieux.

Entre.

C'était Aria, cela ne faisait aucun doute Il n'y avait qu'elle qui pouvait entrer et sortir aussi librement dans les quartiers de Magnolia.

Entre.

Ce seul mot avait suffit à lui arracher un sourire, alors qu'elle affichait un air des plus sérieux quelques secondes auparavant. Sa voix... il ne lui en fallait pas plus pour se sentir bien ! Le simple fait de pouvoir rejoindre sa maîtresse lui procurait un bonheur indescriptible. Aria s'avança d'un pas assuré vers ce lit, sur lequel elle savait qu'elle La trouverait, avant de s'agenouiller. L'adolescente était encore vêtue comme la veille, c'est à dire d'un simple jeans délavé, de ses grosses baskets usées, d'une chemise surmontée de sa veste, ses mitaines toujours aux mains, le tout dans des tons noirs. Son regard curieux se porta sur Magnolia, qui n'en était encore qu'au réveil... la pauvre jeune femme détestait qu'on la dérange lorsqu'elle n'était pas encore totalement éveillée, et elle avait bien raison ! Il fallait être bien idiot ou méchant pour venir la déranger avec des futilités dès le matin. Mais... elle-même, n'était-elle pas venue faire son rapport un peu trop tôt ? Elle s'en voulait de ne pas avoir attendu encore un peu, pour lui laisser l'occasion de se préparer avant de faire face à une nouvelle déception.

Même après avoir traîné, mains dans les poches, dans les recoins les plus glauques et suspects de la ville, elle n'avait trouvé aucune informations digne d'intérêt pour sa supérieure. Des ragots sans fondements selon lesquels telle ou telle personne serait capable d'utiliser la magie, des gens se plaignant de leur condition et qui aimeraient que le pouvoir actuel tombe, bien évidemment, elle en avait entendu beaucoup ! Et elle le mentionnerais dans son rapport, lorsqu'elle aurait droit à la parole. Mais elle n'avait surpris aucune menace directe et imminente qui aurait pu mettre Magnolia en danger. En vérité, tout était plutôt calme, ces derniers temps. Pourtant, le calme, elle n'aimait pas beaucoup ça ! Elle ne pouvait savoir tout ce qui se tramait dans les bas fonds, et cela l'énervait énormément. Rien que l'idée que sa maîtresse puisse être en danger d'une quelconque manière la mettait hors d'elle ! De plus, la jeune fille se doutait bien que Magnolia non plus n'apprécierait pas ce manque de nouvelles concrètes... surtout à répétition.

Aria posa son regard curieux sur la jeune femme, prenant le temps de l'admirer dans toute sa splendeur. Décidément... même à peine éveillée, Magnolia était superbe... superbe, oui, il n'y avait probablement pas d'autre mot. Aussi légèrement vêtue, étendue et avec un air d'apparente vulnérabilité sur le moment... pouvait-il exister une femme plus belle ailleurs ? Impossible ! Depuis deux années, elle avait vu des foules de gens défiler sous ses yeux, mais tous n'étaient que d'ignobles humains plus dégoûtants les uns que les autres. Personne, non, absolument personne ne pouvait arriver à la cheville de la déesse qui lui avait sauvé la vie. Se rendant compte qu'elle la fixait un peu trop intensément, Aria baissa la tête vers le sol sans avoir pu s'empêcher de rougir mais tout en ayant gardé son petit sourire. Elle n'oserait probablement plus relever la tête, maintenant.

-"Bonjour, maîtresse. Dois-je repasser plus tard ?"

Toujours aller droit à l'essentiel, comme on dit...

Elle ne s'était pas trompée. C'était bien Aria. Magnolia regarda l'adolescente entrer et s'avancer jusqu'à son lit. Encore une fois, elle était habillée avec des fripes. Enfin, cela l'aidait à rester discrète. Il valait mieux qu'elle évite de dire à tout le monde à qui elle appartenait si elle voulait pouvoir infiltrer un milieu. Personne, oh non! personne, ne lui parlerait franchement et ne lui livrerait ses secrets si ils savaient qu'elle travaillait pour Magnolia. Ils avaient tous trop peur. Les nobles avaient peur de la disgrâce, peur d'offenser la princesse du Temple et de ne plus pouvoir gagner ses faveurs. Le peuple, croyant fermement que Magnolia était l'enfant des Dieux, avait peur du châtiment divin, peur de commettre un blasphème. Aucun méfait ne serait révélé, aucun complot ne serait découvert, aucune intrigue ne serait percée à jour si l'on découvrait qui était la maîtresse d'Aria.

La jeune femme restait immobile, trop confortablement installée pour bouger. La torpeur de la nuit ne s'était pas encore totalement dissipée. Elle sentait le regard de l'adolescente s'appesantir sur son corps. Un instant, elle songea à lui faire baisser le regard. Elle ne faisait rien de bien grave, mais se faire dévorer du regard dés le petit matin n'était pas vraiment au goût de Magnolia. Dans un élan de générosité, elle décida de compter jusqu'à 10 et si à 10 sa chose n'avait toujours pas baisser les yeux et ne se montrait pas un peu plus humble, elle lui donnerait une leçon d'humilité. *Après tout, cela fait longtemps qu'elle ne m'a pas vu. Je peux bien lui laisser ce petit plaisir. 1... 2... 3... 4... 5... 6... 7... 8... Encore un peu et j'aurais pu... enfin.*

Aria, rougissante, venait de baisser la tête et fixait désormais le sol. Apparemment, elle s'était souvenue où était sa place et elle se rappelait également que Magnolia n'aimait pas être dérangée, surtout si ce n'était pas important, au réveil. La jeune femme joua un instant avec l'une de ses longues mèches noirs avant de la laisser retomber. Elle frôla du bout des doigts le bas de son cou. Voulait-elle écouter le rapport de la brave petit Aria revenue de mission? Ou prendre son temps pour se lever?

Non. Dit moi ce que tu as trouvé.

La curiosité l'avait emporté. La jeune femme voulait savoir ce qu'il se disait hors des murs du Temple.

Aria se mordit la lèvre inférieure lorsqu'elle reçut l'autorisation de parler, de plus en plus certaine que ses réponses ne seraient pas suffisantes.

-"Rien de vraiment intéressant, malheureusement."

Dire que pour faire cette révélation des plus incroyables, elle avait du passer d'assez désagréables moments en compagnie d'individus qu'elle haïssait par dessus tout. Dans les bas quartiers, elle était considérée comme l'une des leurs. Beaucoup de pauvres la connaissaient et lui parlaient régulièrement lorsqu'ils la croisaient, leurs sujets de conversations passant de "la pluie et le beau temps" au "pauvre Michel-qui-est-cloué-au-lit-à-cause-d'une-saleté-qu'il-a-attrapée-on-ne-sais-où"... sans oublier toutes les étapes intermédiaires, toutes plus intéressantes les unes que les autres ! Tss... plus ils lui parlaient, plus elle avait envie de leur hurler de la fermer, de leur dire qu'elle se foutait pas mal du temps qu'il faisait ou de ce crétin de Michel ! Pourtant en extérieur, elle restait simplement une jeune fille souriante semblant particulièrement intéressée par tout ce qu'on pouvait bien lui raconter. Gagner la confiance de tous ces pauvres bougres lui avait déjà permis de leur soutirer des informations précieuses de par le passé. Le plus amusant dans l'histoire était sans aucun doute possible qu'aucun de ces imbéciles ne se doutait une seule seconde que la douce et gentille jeune fille pouvait les espionner pour le compte de la grande Magnolia. Ils seraient capable de s'écrier "impossible, c'est une gentille fille qui ne nous trahirait jamais ! On la connait trop bien, ça ne peut pas être elle" si on leur mettait toute la vérité en face.
Il suffisait de médire un peu sur la noblesse ou sur le Temple et son autorité pour que ces idiots finis se lâchent et se mettent à vider leurs sacs. Il n'y avait pas si longtemps de ça, un homme avait tenté de la "rassurer" en lui expliquant que lui et les siens préparaient "un petit quelque chose" qui pourrait peut-être "changer les choses." Dès le lendemain, cet homme et ses complices avaient été arrêtés... qui sait ce qui a bien pu leur arriver.

En soirée, elle faisait la tournée des bars les plus louches, tendant une oreille attentive à toutes les conversations. Lorsqu'elle estimait qu'une conversation était assez intéressante pour retenir son attention, elle attendait que l'un des comploteurs se retrouve seul avant d'aller vers lui et tenter de lui arracher les vers du nez après avoir été "gentille" avec lui. La pauvre s'était déjà surprise à en "draguer" quelques uns... enfin... essayer du moins, pour obtenir des confidences... ce qu'on ne ferait pas pour les beaux yeux de sa maîtresse ! Aria était vraiment très peu douée lorsqu'il fallait se faire passer pour une amoureuse ou une catin et répugnait à devoir jouer le jeu. Bon, par contre, elle avait tout de même encore un peu trop d'amour propre pour aller jusqu'au bout dans les deux cas ! Au pire, elle pouvait laisser sa cible l'embrasser, mais elle était capable de tuer sans sommation s'il essayait d'aller trop loin. Cette nuit-ci encore, elle avait du se balader dans la moitié de la ville avec le bras d'un foutu pervers autour de ses épaules durant tout le trajet. Il lui parlait de tout et n'importe quoi, avec son haleine fétide, sauf de ce qu'elle voulait entendre, bien évidemment ! L'adolescente (qui s'était sentie mal au point d'en avoir envie de vomir à force d'être serrée par ce vieux poivrot dégénéré) avait réussit à amener ce dernier dans un bar après avoir comprit que son "coup du siècle dont on parlerait pendant des années" n'était qu'un feu d'artifice pour l'anniversaire d'un "pote." Là, elle lui avait payé autant d'alcool fort qu'il l'avait voulu et il avait fini par comater sur sa table, lui laissant enfin le champ libre pour qu'elle puisse décamper.

La nuit, elle traînait dans les quartiers réputés comme les plus "dangereux" où elle se faisait souvent aborder par des bandes de jeunes "caïds" qui pensaient sincèrement pouvoir l'effrayer ou lui voler quoi que ce soit. Les pauvres... s'ils savaient qu'elle était capable de les mettre K.O. facilement, ils chanteraient probablement un autre air ! Puis, après les avoir analysés, elle tentait de les imiter, tant au niveau du jargon que de l'attitude, afin d'essayer de s'intégrer à leurs groupes. Généralement, une fois qu'ils hésitaient, l'affaire était gagnée ! En tant que "nouvelle provisoire", elle recevait beaucoup de conseils et on lui racontait facilement tout ce qui se tramait dans le quartier. Aujourd'hui, Aria avait passé toute la nuit à terroriser de pauvres passants nocturnes et à rigoler sur des blagues totalement stupides... le pire, c'était qu'elle ne comprenait pas la moitié de ces maudites blagues ! Mais une fois encore, rien d'intéressant ne parvint à ses oreilles.
Elle était rentrée au Temple juste après les avoir quittés et leur avoir promis de les revoir le lendemain.

-"Le peuple se plaint, le peuple a envie de changements... ils murmurent entre-eux, à chaque coin de rue, maudissant le pouvoir en place. Mais au final, ils ne font qu'espérer que quelqu'un fasse bouger les choses à leur place, trop lâches qu'ils sont pour agir d'eux-même. Ils ont bien trop peur des nobles, maîtresse. D'eux et du pouvoir que le Temple possède. Ils savent qu'ils ne sont que de misérables insectes face leur volonté. Un jeune homme que l'on appelle Aliot et qui habiterait "rue de l'affaire" aurait des pouvoirs magiques, mais les habitants du quartier en font une telle affaire que ses capacités risquent de ne plus être secrètes très longtemps. Si ce n'est pas un charlatan, comme la plupart des autres, évidemment. J'ai retrouvé sa piste, mais il a refusé de m'adresser la parole, prétextant qu'il n'avait rien à dire à une gamine dans mon genre. Quant au reste... "

Aria n'avait toujours pas relevé la tête, s'efforçant un maximum d'ancrer son regard dans le sol.

-"J'ai fais mon possible pour qu'ils me confient leurs secrets, mais si secrets il y a, ils sont restés muets comme des carpes à ce sujet. Je n'ai entendu parler d'aucun complot, d'aucune machination visant à renverser le pouvoir en place. De plus, ils continuent de vous manger dans la main, maîtresse. Ils vous adorent et sont persuadés que vous êtes à la merci de tous ces idiots... ils n'oseraient pas vous faire le moindre mal. Néanmoins, tout semble calme, beaucoup trop calme... Je suis sincèrement désolée !"

Pourtant, elle était certaine que personne ne pouvait savoir qu'elle travaillait pour les plus hautes sphères de ce monde. Après chaque nouvelle mission, elle faisait bien attention de ne pas être suivie, attention à ce que personne ne puisse la voir se diriger vers le temple. Elle avait affiné sa technique afin que personne ne puisse la soupçonner de quoi que ce soit lorsqu'elle posait ses questions. Il était impossible que qui que ce soit puisse être au courant de son travail d'espionne ! Alors... pourquoi s'excuser ? Parce que c'était comme ça. Si elle n'avait rien à raconter, c'est qu'elle avait mal fait son travail, tout simplement... qu'elle avait encore perdu son temps ! Et elle était la première à s'en vouloir pour ça ! Pas parce qu'elle avait peur d'une punition qu'elle ne trouverait que trop juste, mais simplement parce qu'elle détestait décevoir sa maîtresse.

Magnolia écoutait. Elle ne prit pas la peine de jeter ne serait-ce qu'un coup d'œil à Aria. L'adolescente faisait son rapport habituel. Un peu trop habituel même. Voilà déjà plusieurs fois que la jeune femme entendait le même rapport. Bien sûr, sa petite chose avait pris le soin de changer la formulation mais pour la nième fois, elle lui répétait la même chose. La forme changeait, mais pas le fond. Et cela l'exaspérait. Enfin! Ce n'est pas comme si le monde avait arrêté de tourner! Les choses changeaient, bougeaient, toujours, tout le temps, de partout! Il devait bien y avoir des informations qui valaient la peine d'être dénichée! Et malgré tout, Aria n'avait rien d'autre à dire à part des banalités ou des choses que Magnolia savait déjà.

Bien sûr, la populace se plaignait de sa situation et en voulait après le Temple et les nobles. Après tout, ils étaient traités pire que de la vermine et vivaient dans des taudis pire que des trous à rats. Cependant, lâches comme ils étaient, ce n'était pas eux qui allaient mettre en marche une révolution! Non, le jour où il faudra commencer à s'inquiéter, ce sera le jour où l'un des ses voyageurs comme on les appelait deviendra soudainement plein de vertu et au nom d'une pseudo-justice décide de renverser la hiérarchie établie. Il y en ait toujours, des imbéciles heureux bourrés de principes et de bonnes volontés. Et il y avait toujours des idiots pour les suivre. Avec un minimum d'intelligence et quelques armes correctes Mais après tout, qui leur avait demandé de naitre pauvres, hein?

Bien évidemment, ils lui mangeaient dans la main! Elle ne jouait pas à la gentille petite fille pleine de douceur et de pureté depuis plus de vingt ans pour rien! Elle ne souriait pas à ces gueux et ne prenait pas la main des lépreux et autres cadavres en attentes pour rien. Alors elle espérait bien qu'ils lui mangent dans la main et qu'ils la suivent sans poser de question, après tout ces efforts! Il ne manquerait plus qu'ils aient envie de se rebeller contre elle tient!

Quant à celui qui l'on nommait Aliot, les hommes du Temple se chargeront de lui. Si il possède réellement des dons pour la magie, alors le Temple l'accueillerait à bras ouvert et lui offrirait une nouvelle vie bien meilleur que celle qu'il connaissait en cet instant. Si il se faisait juste passer pour un mage potentiel, alors il recevrait une petite leçon lui apprenant que ce n'est pas beau de mentir. La magie était suffisamment rare pour que l'on puisse affliger un châtiment bien senti à celui qui voulait se faire passer pour mage sans en avoir les qualités; d'autant plus que seul les membres de l'élite avait en eux du mana.

Magnolia alla s'assoir juste devant l'adolescente. Un instant, elle la considéra de ses yeux noirs. Elle la détaillait du regard. Puis elle avança une main. De sa main gauche, elle souleva le menton d'Aria de telle sorte qu'elle puisse la regarder dans les yeux lorsqu'elle parlerait. Ses doigts glissèrent sur sa peau en une caresse lente et légère. Un sourire doux apparut sur son visage. Elle-même se pencha légèrement, se rapprochant de sa chose.

Aria. Ce n'est pas qu'il n'y a aucun secret. Ce n'est pas qu'il n'y aie aucune information qui vaille la peine d'être connue. C'est juste que tu n'as pas cherché aux bons endroits. A quoi cela sert-il que tu persistes à chercher quelque chose là où tu ne le trouveras jamais, surtout quand tu le sais déjà?

Alors qu'elle parlait d'une voix calme et que l'on aurait put croire bienveillante si ce n'était par cette froideur inattendue qui se dégageait de la jeune femme, sa main droite était allée se nicher dans le cou de d'Aria. Elle fit glisser ses ongles, appliquant une légère pression, contre la peau de l'adolescente. La menace était claire. Magnolia n'était pas satisfaite du travail de son esclave et elle n'allait pas accepter plus d'échec.
Elle retira ses mains, se redressa et leva lentement la main droite. Souriante, elle gifla l'adolescente avec une telle force que la tête d'Aria fut projetée contre le marbre qui recouvrait le sol de la chambre. D'un coup sec, elle écrasa la charmante petite tête de sa chose avec son pied gauche.

Tu vérifieras si il n'y a pas d'anomalie, de choses inhabituelles ou quoi que ce soit du coté des marchands. Vérifie les transactions, légales et illégales.

Aria, tête toujours baissée vers le sol, se rendit compte que le silence venait s'installer depuis quelques longues secondes. Elle ne put s'empêcher de se demander ce qui allait bien pouvoir lui arriver, cette fois-ci. De légers bruits lui indiquèrent que sa maîtresse venait de s'asseoir non loin... la sentence allait tomber sous peu ! Mais elle l'avait bien mérité, après tout... D'un coup, elle sentir les doigts de son impératrice tant aimée venir lui toucher le menton, lui relever la tête... la pauvre fille se laissa faire sans opposer la moindre petite résistance, plongeant ses yeux bleus dans ceux de la jeune femme. Les mains de Magnolia vinrent caresser l'adolescente, alors que son visage se rapprochait dangereusement. Aria rougit encore plus, tout en sachant qu'elle ne pourrait détourner le regard. Au fond, elle considérait ce moment comme un véritable bonheur, à tel point qu'elle aurait pu ronronner de plaisir si elle l'avait pu. L'un de ses plus doux rêves était sans doute de pouvoir se blottir contre sa maîtresse et de rester dans cette position durant des heures, des jours, des années ; sans que ce moment puisse se terminer un jour. Imaginez un peu comment elle pouvait se sentir en cet instant ! D'autant plus que Magnolia affichait un sourire qui en aurait fait craquer plus d'un.

Malheureusement, les paroles qui suivirent contrastèrent fortement avec la douceur qui émanait de la jeune femme... bien sûr que non, elle n'était pas contente ! Elle avait parfaitement raison, il y aurait toujours des secrets et des gens pour les découvrir, il fallait juste mieux chercher ! En cet instant, le visage d'Aria n'exprima plus qu'une infinie tristesse. Pas besoin de lui poser cette question pour qu'elle se rende compte de son incompétence ! Elle éprouvait déjà une forte culpabilité et s'était juré en cet instant d'être plus efficace, quel que soit le type de mission imposé. Pourtant, l'adolescente n'allait pas s'en tirer à si bon compte, ça c'était certain ! D'autant plus que ongles de Magnolia étaient en train de lui rentrer dans la peau, signe que cette dernière n'allait pas en rester là. Aria se releva en même temps que celle qu'elle se devait d'aimer par dessus tout et s'attendait à de sévères réprimandes...

La suite fut un peu plus violente que prévu. Dans un claquement époustouflant, la main de Magnolia s'abattit avec une grande force sur le visage d'une Aria tellement prise au dépourvu qu'elle ne put empêcher sa propre chute, sa tête allant se cogner contre le marbre. Pour un rude choc, ce fut un rude choc ! Il fallut quelques secondes à Aria avant qu'elle ne reprenne ses esprits et se rende compte de ce qu'il s'était passé. La pauvre fille tenta péniblement de se relever, en ajoutant :

-"Toutes mes exc..."

Mais il fallait croire que Magnolia n'avait pas envie de l'écouter pour autant ! Cette dernière ne lui laissa ni le temps de se relever, ni la possibilité de s'exprimer : son pied s'abattit sur la tête de son esclave dévouée. Aria ne s'attendait pas plus à ce second coup qu'au premier... elle devait avoir l'habitude, pourtant ! Au moment de percuter à nouveau le sol, l'adolescente ouvrit grands ses yeux qui n'exprimaient qu'une profonde surprise. Le second coup fut d'ailleurs plus rude encore que le premier.

-"Argh..."

Par réflexe, Aria agrippa la cheville de sa maîtresse, tentant de retirer sans succès ce pied qui lui écrasait la tête contre le sol. Dans sa position, de toute manière, elle n'aurait jamais pu se sortir de cette situation désagréable et puis... elle n'avait aucun droit de toucher son impératrice ! Embarrassée, la jeune fille s'empressa de relâcher le pied de sa supérieure lorsqu'elle se rendit compte de sa bêtise. Elle était vraiment impardonnable ! Magnolia avait absolument tous les droits, et si la frapper pouvait l'apaiser, alors il ne fallait en aucun cas l'en empêcher ! Aria laissa ses mains retomber au sol, ne pouvant s'empêcher de pousser des gémissements de douleurs et s'efforçant de se laisser faire sans que son corps ne réagisse encore au quart de tour. Après un nouveau petit cri étouffé qui en disait long sur le caractère confortable de sa situation, l'adolescente s'écria :

-"Je suis vraiment désolée ! Je ne voulais pas, c'est... "

Toujours à se trouver des excuses, hein ? Quand on fait une connerie, ma vieille, on assume et c'est tout !

-"Je ne suis qu'une bonne à rien, une idiote incapable ! Je vous promet de ne plus vous décevoir ! "

Combien de fois Magnolia avait-elle bien pu entendre ce genre de discours, de belles promesses ? Plus d'une, ça c'était certain ! Mais au moins, Aria redevenait un peu plus humble, plus réaliste de son propre point de vue.

-"Je vérifierais ! Je vérifierais, plusieurs fois, je ne laisserais rien m'échapper ! Je vous le jure !"

Ça se voyait tant que ça, qu'elle avait envie d'être libérée de la pression qu'exerçait le pied de l'enfant des dieux sur sa tête ?

Aria attrapa la cheville de Magnolia. Comment? Elle osait vouloir aller à l'encontre de sa maitresse? Alors que sans elle, elle ne serait rien? Si l'enfant du Temple n'avait pas pris la peine d'aller la chercher, de la recueillir, de lui apprendre ce dont elle avait besoin, de la nourrir, de la loger... que serait-il advenu d'elle? Hein? Elle se serait fait vendre au marché noir, serait devenu un jouet pour l'un de ces pervers complètement détraqué ou peut-être serait elle dans un état moribond sillonnant les rues sordides des bas quartiers? Enfin, encore faudrait-il qu'elle est survécue aux blessures qui lui avaient été infligées lors des expériences. Et même si elle y aurait survécu, il ne fait aucun doute que les assassins du Temple se serait chargée d'elle vite fait bien fait. Et maintenant, elle voulait se rebeller contre Magnolia, elle qui était sa chose? Aurait-elle la mémoire défaillante? Ou bien serait-ce l'influence des bas-fonds? En tout cas, il était grand temps de lui inculquer la notion de discipline, à cette gamine ingrate.

Les traits de la jeune femme s'était durcies. Son regard était devenu froid. Au fond de ses yeux noirs, un éclat de cruauté et de colère froide luisait. Aria avait arrêté de se débattre sous son pieds et cherchait de misérables excuses. Vraiment, si des excuses suffisaient, il n'y aurait de meurtres, de guerres ou d'autres joyeux évènements du même genre. Si elle croyait que ces minables excuses suffiraient pour apaiser sa maitresse, l'adolescent se trompait furieusement. Tiens, la voilà qu'elle passait en mode auto-flagellation. Ce qui ne fit que rendre l'humeur de la douce Magnolia encore plus noire qu'elle ne l'était déjà. Un léger signe de dégoût lui fit tordre la commissure de ses lèvres vers la bas. Si elle savait qu'elle était une idiote incapable, pourquoi ne faisait-elle rien pour améliorer la situation? Si elle était suffisamment lucide pour se rendre qu'elle était tout bonnement incompétente, elle pouvait bien connecter ses deux mignons petits neurones pour trouver une solution et pour mieux faire son travail. Les faire fonctionner une fois de temps en temps ne pourrait pas leur faire du mal.

D'un geste lent, après avoir exercé encore quelques secondes une forte pression avec son pieds, puis retira sa jambe lentement. Elle laissa souffler Aria, lui donna l'illusion que ses pseudos-excuses et son auto-flagellation avaient suffit à la contenter. Puis vicieusement, un sourire cruel sur son visage, Magnolia donna un grand coup de pieds dans le ventre de l'adolescente encore à terre, couchée sur son flan. Tranquillement, elle s'assit sur elle puis saisit sa main. C'était donc cette même main qui avait saisi sa cheville, hein... Magnolia saisit le poignet de la jeune fille et tira un coup sec dessus en se relevant. Elle tourna le bras d'Aria de telle manière que les tendons de son épaule était sur le point de se déchirer. Lui démettre l'épaule aurait été facile. De sa main encore libre, elle saisit les doigts de sa chose.

Alors, ce sont ses vilains doigts qui se sont agrippés à ma cheville.

Un à un, elle les poussait en arrière. Suffisamment pour qu'une sensation douleur se fasse sentir, pas assez pour lui briser les doigts. Les lui briser aurait eu des conséquences trop embêtantes pour le plaisir que Magnolia allait en retirer. Néanmoins, elle continuait à augmenter la pression, rapprochant les doigts et l'épaule de la blessure. Elle sentait l'adolescente se tendre sous elle. Elle lui lâcha soudainement la main pour l'attraper par les cheveux.

Vraiment, ça me fend le cœur d'avoir à faire ça. Mais si tu ne te comporte pas correctement, je suis obligée de te punir, non?

lui susurra-t-elle à l'oreille avant de la jeter contre une commode de toutes ses forces. Elle lui tapota affectueusement la joue avant de marcher de lui donner un dernier coup dans l'estomac avant d'aller jusqu'à sa coiffeuse. Elle ouvrit une petite boite noire en bois laquée avec une fleur de magnolia en nacre incrustée. A l'intérieur, se trouvaient des petites boules de sucres blanches parfumées à la rose enrobant une graine d'anis. Elle en choisit une et la posa sur sa langue. Voilà qui lui faisait plaisir et l'aida à terminer de calmer son tempérament... très spontané. Sans se retourner, elle ordonna à l'adolescente de vaquer à ses tâches matinales habituelles : préparer les affaires de sa maitresse puis l'assister dans sa toilette après, bien sûr, avoir pris le soin de vérifier que l'eau du bain était à la bonne température. Lorsque Aria était absente, ses suivantes s'occupaient de cela. Mais depuis que la jeune fille avait été accueillie par Magnolia et avait été correctement éduquée, c'était elle qui s'en chargeait habituellement.

La jeune femme fixa le miroir de sa coiffeuse un instant. Une Aria pressée courant dans toutes la chambre s'y reflétait. Une fois l'adolescente sortie de la pièce pour aller dans la salle de bain ou partie chercher une collation, Magnolia se retourna. Elle traversa la chambre, d'un pas tranquille. Le marbre blanc était froid sous ses pieds. Un instant elle regretta d'avoir rejeté la proposition de mettre des tapis dans la chambre. A une poignée de centimètre de la verrière qui remplaçait le mur Est de la salle, la princesse du Temple s'arrêta. Elle se tenait immobile, observant à travers ces vitres immenses l'océan couronné du premier soleil. Le deuxième astre diurne ne s'élevait que très lentement, laissant son ainé le dépasser allègrement. D'ici une demi-heure, les deux globes de feu impitoyables règneront dans le ciel de Shangri-La, brûlant tout ceux s'aventurant en dehors des dômes. Les îles étaient les seuls terres épargnées. Mais au moment où Magnolia admirait la course lente et ininterrompue des soleils jumeaux, la brume laissée par la nuit ne s'était pas encore dispersée. Le continent principal était caché aux yeux de la jeune femme par ce voile naturel.

Aria en avait terminé avec les préparations du bain. A nouveau, elle l'avait appelée "mon Impératrice". Un sourire léger vint danser sur les lèvres de Magnolia. On l'appelait de biens des noms passant par usurpatrices pour les rares hérétiques maudissant le Temple lorsqu'ils étaient sûr qu'aucune oreilles indiscrètes ne les entendent, pour aller jusqu'à enfant des dieux, la princesse du Temple, et autres. La lumière des soleils doubles baignait la visage de la jeune femme la réchauffant doucement. Son sourire s'élargit un peu plus avant de se diriger vers la salle d'eau.

Le bain était prêt. Magnolia laissa glisser sa robe de nuit à l'entrée de la salle d'eau. La baignoire, qui ressemblait plutôt à une petite piscine, était creusée. Une fois installée, une coupe de fruit frais était à portée de main. La jeune femme se laissa glissée dans l'eau et s'allongea au fond de la baignoire, entièrement immergée. Au fond de l'eau, elle se sentait en sécurité, dans son élément. Détendue, elle fit surface puis attrapa quelques fruits avant d'ordonner à Aria de continuer son travail, entre autre lui laver les cheveux.

Suivant les ordres habituels de sa maîtresse, Aria suivit cette dernière jusque dans la salle d'eau, bien décidée à s'appliquer du mieux qu'elle le pourrait. Très franchement, les coups reçus avaient déjà été oubliés, mais la morale de toute cette histoire était restée ancrée tout au fond d'elle : Magnolia pouvait être sure que sa chose ne commettrait pas la même erreur une nouvelle fois ! Plongée dans ses pensées, l'adolescente s'arrêta à l'entrée de la salle d'eau, un peu en retrait. Elle savait que ce fait qu'elle redoutait tant était sur le point de se produire ! La jeune fille prit une profonde inspiration et regarda celle qu'elle aimait par dessus tout se débarrasser de sa robe de nuit avec... disons... un intérêt certain. Elle ne devait pas regarder ! Vite, on baisse les yeux et... et... on tombe sur le fessier de la maîtresse ! Argh ! On remonte, vite ! Ha ! Le plafond ! D'un coup, ce sacré vieux plafond devenait très intéressant et très beau aussi ! Bon, pas aussi beau que... NON ! Surtout, arrêter de penser à ça ! Bon sang... mais il fallait avouer que c'était difficile de penser à autre chose dans une situation pareille.

Aria vint se placer à côté de la baignoire creusée dans le sol et attendit, admirant les alentours comme elle le faisait presque tous les matins, rouge comme une pivoine. Mais bon... malgré tous ses efforts, elle ne réussit pas à aller à l'encontre de cette envie bien trop pesante pour ses petites épaules et baissa son regard vers le bain, où elle eut, comme souvent, l'occasion d'admirer le corps de son impératrice. Elle restait là, sans se départir du rouge qui teintait son visage, affichant un sourire béât. Chaque fois qu'elle observait Magnolia dans cette tenue... enfin, dans cette absence de tenue, plutôt, elle ressentait quelque chose qu'elle était bien incapable de décrire et qui la rendait tout simplement heureuse. Elle ne pouvait s'empêcher de penser que c'était simplement parce qu'elle avait l'immense privilège de pouvoir dévorer des yeux la femme la plus belle au monde, rien de plus ! Même si elle savait qu'au fond, ce n'était pas tout à fait ça.
Et si son état en cet instant vous étonne, surtout après avoir pu la contempler presque chaque matin depuis deux ans, essayez un peu de vous imaginer la première fois ! Comment expliquer... Imaginez-vous deux minutes Aria au bord de l'évanouissement, saignant abondamment du nez, et vous y êtes plus ou moins ! Ha ben ça, c'est sur que ça avait été un drôle de choc ! En tant qu'esclave et servante, elle s'était bien sur imaginé devoir aider sa maîtresse dans les tâches quotidiennes... comme la coiffer, l'aider à choisir ses vêtements du jour ou encore lui masser les pieds, par exemple ! Mais de là à penser qu'elle devrait aller jusqu'à l'assister dans le bain...

Bref ! Aria attendit un moment que sa maîtresse puisse se relaxer avant de décider qu'il était temps d'aller chouchouter cette dernière. Elle retira sa veste et ses mitaines, qu'elle partit déposer un peu plus loin à même le sol, et vint s'agenouiller derrière Magnolia. Toujours aussi tomateuse qu'aux premières secondes, elle plongea ses deux mains dans l'eau, fixant les épaules de sa déesse avec insistance. L'adolescente sentait ses mains trembler d'envie, alors qu'elle désirait ardemment pouvoir ne serais-ce que toucher les dites épaules. Mettez vous un peu à sa place ! Elle avait le plus beau de tous les trésors juste là, à portée de main, avec l'interdiction tacite de l'effleurer, ne serais-ce que du bout du doigt. Pour elle, résister à la tentation était dur, très dur, mais elle pourrait aisément se contenter des cheveux de la belle. D'ailleurs, en parlant de ça, elle commença doucement à s'occuper de laver les cheveux de sa maîtresse, les remouillant bien avant d'y appliquer un shampooing senteur citron et de les masser consciencieusement. S'affairant à la tâche mais toujours autant décidée à se faire pardonner, la jeune fille osa poser une question :

-"Y aurait-il quelque chose de spécial que vous aimeriez que je fasse, aujourd'hui ? Je... j'ai vraiment envie de vous faire plaisir, de vous savoir heureuse et souriante..."

Non pas que c'était différent les autres jours, mais elle espérait que sa maîtresse ait une envie particulière, qui briserait la monotonie de ses habitudes et qui lui ferait réellement plaisir. Elle venait simplement de proposer à sa maîtresse un petit "extra", sous n'importe quelle forme que ce soit, qui puisse la mettre tout spécialement de bonne humeur. Ha, il ne fallait pas s'y tromper, elle ne faisait pas ça "simplement" pour se faire pardonner, il lui arrivait de poser cette question alors qu'elle n'avait rien à se reprocher, bien au contraire. La journée de la veille et la nuit avaient été longues, et elle avait besoin de voir ne serais-ce qu'un sourire sincère sur les lèvres de Magnolia pour se remettre d'aplomb. Les deux soleils pouvaient brûler autant qu'ils le voulaient, ils n'étaient qu'ombres contrairement à l'enfant des dieux qui illuminait constamment sa vie. Et il fallait avouer qu'elle brillait d'autant plus lorsqu'elle se sentait bien.

La jeune femme, les épaules hors de l'eau, se laissait faire. A force d'entraînement et d'habitude, Aria avait acquis un certains savoir faire pour la ver les cheveux de sa maitresse tout en la relaxant. Étrangement, Magnolia aimait bien qu'on la coiffe et que l'on prenne soin à sa chevelure. Cela lui rappelait son enfance, lorsque la Grande Prêtresse qui l'avait élevée lui tressait les cheveux avant de la mettre au lit. Appréciant le moment, elle attrapa à nouveau quelques fruits qu'elle porta à ses lèvres. Leur fraicheur contrastait agréablement avec la chaleur qui s'était installée dans la pièce. La douceur des uns ne faisait que ressortir l'acidité des autres, ne les rendant que plus délicieux encore. Des fruits aussi frais étaient un véritable luxe sur cette planète où la nourriture était conditionnée pour pouvoir être conservée longtemps, ce qui dénaturait son goût, ou sécher tout simplement. L'esprit calme, elle insuffla un peu de son mana dans l'eau du bain et commença à jouer avec. De longs fils de liquide s'élevèrent de la baignoire et s'entremêlèrent, formant des arabesques au motifs complexes pour se transformer en un oiseau volant dans les aires et devenant à son tour une fleur qui grandissait, bourgeonnait et s'épanouissait. Le bain était l'un des moments préférés de le Magnolia.

-"Y aurait-il quelque chose de spécial que vous aimeriez que je fasse, aujourd'hui ? Je... j'ai vraiment envie de vous faire plaisir, de vous savoir heureuse et souriante..."

Les yeux de la jeune femme s'illuminèrent. Cela faisait un mois, jour pour jour, qu'elle n'avait pas pu quitter le Sanctuaire à cause de ses offices. Représentante de la religion supérieur même à la Grande Prêtresse au sein du Temple, il était normal qu'elle préside toutes les cérémonies religieuses tenues à l'échelle mondiale. Et voilà que depuis un mois, elle ne pouvait plus quitter le Sanctuaire pour ces mêmes raisons : il s'agissait d'un rituel visant à se purifier et à réfléchir à ses actes tout en faisant preuve de pitié envers les Dieux. Devant se préserver de toute impureté, elle était obligée de rester dans un lieu sacré et de faire régulièrement des ablutions. Hors de question de déroger à la règle : tout les jours, après ces ablutions, elle devait saluer la foule et bénir les nombreux pèlerins qui avaient fait le déplacement jusqu'à l'île et cette période toute particulière de l'année. Ne pas exécuter le rituel aurait été un trop grand risque de se faire démasquer.

Allons en ville! Je dois clore le rituel de Purification au moment où les soleils disparaissent, mais après, j'ai quartier libre. On pourra allez se promener ou faire des achats! J'en ai assez de devoir rester cloitrer ici. J'ai besoin de sortir, j'en ai assez de tourner en rond. Oh! et les rues doivent être entièrement décorées! Les festivités doivent commencer ce soir! On restera dans l'anonymat, comme ça je pourrais me promener tranquillement. Après tout, personne ne me reconnaitra. Je suis trop loin de la foule lorsque j'apparais en public pour que l'on puisse voir mon visage clairement, et de toute manière, personne ne s'imagine l'enfant des dieux se mêler au commun des mortels.

Le festival lui changerait les idées. Deux festivals d'une telle ampleur avaient lieu chaque année, marquant à chaque fois la fin des deux plus importantes cérémonies religieuses. Les rues étaient décorées, illuminées. Les festivités étaient toujours l'occasion de faire du profit pour les commerçant alors qu'une atmosphère plus légère et plus joyeuse qu'à l'accoutumer s'installait.

-"En ville... toutes les deux ? Sans votre escorte ?"

Aria se doutait bien que si sa maîtresse parlait de ne pas être reconnue et de rester dans l'anonymat, elle comptait bien ne pas emmener ses gardiens avec elle... L'adolescente aurait tant voulu contester cette décisions, mais... Magnolia semblait tellement enthousiaste à cette idée ! La jeune fille n'avait aucunement l'intention de la décevoir en rouspétant sur ce genre de détails. De plus, une sortie avec sa maîtresse, juste toutes les deux, n'était pas pour lui déplaire ! Quand bien même quelqu'un reconnaîtrait l'enfant des dieux, Aria se sentait assez forte pour la défendre contre toute une foule en délire. A coup de pistolet s'il le fallait. Elle ne laisserait jamais personne la toucher, c'était une certitude !

-"Les rues sont décorées, c'est même assez joli... l'ambiance est à la fête depuis un moment déjà, l'évènement de ce soir va marquer les esprits, comme toujours. Je suis certaine que la promenade sera très agréable !"

Et pour une fois, Aria ne mentait pas ! Même si devoir se balader au milieu de foules d'humains la répugnait au plus haut point, elle aurait sa déesse à ses côtés avec qui parler ! Même si l'idée du shopping ne l'emballait pas tellement, tant qu'elle serait aux cotés de Magnolia, elle supporterait absolument n'importe quoi ! La preuve, elle supportait bien l'humiliation, les ordres et les coups depuis deux ans, revenant toujours en demander plus avec le sourire, alors qu'elle n'était absolument pas masochiste ! Elle n'avait aucun mal à se faire aux récompenses, aux marques d'affection et aux petits bonheurs comme celui qui l'attendaient ce soir.
Aria continuait de masser les cheveux de sa maîtresse en pensant à la soirée qu'elle allait passer. Après un soupir silencieux, elle s'appliqua à terminer de s'occuper des cheveux de son impératrice, avec son talent habituel. Fière de son travail, elle se releva et revint se placer aux cotés de sa maîtresse, admirant les arabesques et les formes que les minces filets d'eau pouvaient prendre... même si elle en profitait pour jeter quelques coups d'œil discrets à son corps.

Elle attendait désormais des ordres clairs pour bouger alors qu'elle commençait à s'habituer à la chaleur qui était en train de s'emparer de l'endroit. Elle commençait à se dire qu'elle devrait profiter de quelques instants libres pour aller se laver elle aussi, histoire de ne pas sentir le putois, et se reposer un peu. La nuit avait été longue et elle voulait être en forme pour la sortie du soir. Si elle se fatiguait trop, ses réflexes et sa concentration en souffriraient grandement... elle voulait être fin prête pour protéger celle qu'elle aimait par dessus tout !

Oui, sans escorte. C'est plus pratique pour passer inaperçue.

Un grand sourire était apparu sur le visage de Magnolia. Aria avait donné son accord et allait l'accompagner lors de sa petite promenade. Enfin, ce n'était pas comme si elle avait vraiment le choix. Si l'adolescente avait eu l'audace de lui refuser cette requête après lui avoir elle-même demander ce qu'elle voulait, la correction qu'elle aurait reçu été... comment dire... mémorable. Il faut toujours tenir sa promesse. On ne retire pas non plus le pain de la bouche de celui à qui on vient de le donner.

La sortie prévue pour le soir mit Magnolia de très bonne humeur pour le coup. La ville allait être décorée, l'ambiance allait être festive, l'atmosphère vibrante. Oui, cette promenade sera merveilleuse, surtout après un mois de confinement dans cette cage dorée. Ce sera sa petite bouffée d'oxygène, son bol d'air frais. Incognito, perdue au milieu de la foule, la jeune femme pourra flâner au milieu des échoppes, grignoter des encas de mauvais qualité vendus par les marchands ambulants, regarder les feux d'artifices... Et tout ça, sans avoir à mettre un masque, sans avoir à jouer la comédie. Pour une nuit, devant les autres, Magnolia n'aura pas besoin d'endosser le rôle de petite princesse pure et innocente, pleine de piété et de compassion. Sans se soucier du regard des autres, elle pourra agir et se comporter comme elle l'entend, sans avoir à peser le moindre de ses gestes. Cette perspective la mettait en joie.

Aria avait fini sa tâche et était venu sagement se placer à ses cotés. Un sourire aux lèvres, Magnolia la congédia sans lui donner de nouveaux ordres. Aujourd'hui, elle lui laisserait la journée pour elle. Sa chose aura quartier libre jusqu'à leur de quitter le Sanctuaire. L'enfant des dieux la laissera tranquille jusqu'à ce que leur de partir vienne, lui permettant de prendre un peu de temps pour elle, pour qu'elle puisse se reposer et se laver aussi. Aria sortit de la pièce. Magnolia, quant à elle, continua à jouer dans son bain durant un bon moment avant de terminer de se laver et de partir. Une camériste l'aida à s'habiller, une autre suivante s'occupa la coiffer d'une manière des plus complexes. La journée allait réellement commencer dès qu'elle passera le seuil de sa chambre. Beaucoup de travail l'attendait.